Marcher…
Marcher est un verbe qui ne se conjugue bien qu’avec les pieds. La marche nous rentre dans le cœur. En passant par les pieds. La marche est humble.
Aller à pied c’est n’avoir ni cheval, ni voiture, ni vélo, ni moto, ni avion, ni fusée, ni bateau, ni navire pour se déplacer. La marche est une affaire de pauvre.
Mais aussi la marche tient debout. Celui qui marche se dresse le front haut. Il ne rampe pas, il n’avance pas à quatre pattes, mais la tête au ciel et la terre à ses pieds.
La marche avance pas à pas. Il faut arracher chacun de ses pas au pas qui le précède. Chaque pas est une patience, chaque pas est un ouvrage.
La marche conquiert chacun de ses pas sous le pas inerte de la terre. Marcher c’est toujours se désinstaller. C’est accepter de n’avoir d’autre terre que le mouvement. Marcher, c’est vivre entre deux pas. C’est habiter les déplacements. Marcher, c’est toujours oser quitter, se risquer pour l’inconnu.
Marcher est fragile. La marche ne trouve son équilibre qu’en passant d’un déséquilibre à n autre. Ainsi la marche est elle aussi démarche.
La marche finit bien par mener au cœur où il refusait d’aller. La marche entraîne le cœur par les pieds, elle entraîne en avant : marcher, c’est aller vers l’autre.
Jean DEBRUYNE.